12 – Pluie d’été

Je guettais la météo depuis quelques jours. A contre courant, oui
puisque c’est la pluie que j’espérais et attendais. Jeudi, belle
dépression en vue, averses toute la journée, cinq à dix millimètres.
C’est le moment ou jamais de sortir!

Direction "mes montagnes"
Comtoises préférées, une heure de route ruisselante au petit matin et
solitude, odeurs vivantes de la nature qui revit, humus, framboises
sauvages dégoulinantes, rivière bondissante…

Apparament
les conditions n’étaient pas encore suffisament installées pour que
cela fonctionne parfaitement. J’ai fait une belle promenade sur une
petite rivière authentique mais les truites n’ont pas répondu. Dommage,
je renouais avec plaisir avec cette belle pèche en sèche en rivière
rapide: fini les bas de ligne démesurés, les attentes feutrées, les
présentations retenues.

Pour un peu, je me sentirai rouillé.

Mais enfin, ce n’était pas ça. L’eau s’est rapidement teintée et je me retirai des belles gorges où retrouver la Rivière Mère.

Changement de moulinet et retour à la "normalité" de nos rivières à belles truites difficiles.

Averses,
averses, le doute s’installe. Il est 13 h et pas une truite. Les eaux
sont vertes. Goutez à la couleur verte émeraude des rivières de Franche
Comté! Leurs algues poubelles.

Quatorze degrés, température de
l’eau: douze degrés. Il y a une semaine, l’eau était à dix neuf degrés! Dommage que cette
belle truite n’est pas gouté ce refroidissement. Elle gisait au fond de
l’eau. Cinquante huit centimètres. Encore belle. Je l’ai échouée sur la
berge qu’elle profite au moins aux renards… Journée bizarre.

Les
averses se suivent mais quelque chose de différent apparait dans
l’atmosphère. Le ciel éclate, c’est l’orage. Le temps se fige. Pas un
souffle de vent. Premiers gobages. Déluge. Une voiture siglée EDF se dirige vers le village. Le chat noir…

Soleil. Les BWO dérivent maintenant par dizaines. Ah, ah, j’ai bien fait de résister! Premiers gobages sur l’autre rive sous la frondaison d’aulnes. Je monte une petite mouche d’Ornans en cul de canard. Je tente d’atteindre le rond magique mais ne réussis qu’à perdre la mouche dans les ronces. Le temps de monter sa jumelle sur le bas de ligne et je m’aperçois que la rivière monte et se teinte. M…e alors! Ces damné techniciens abrutis de leur technologie malsaine font joujous avec la rivière. J’enrage contre ces petits soldats bleus destructeurs de rivière.

Vais-je descendre un peu? Je décide d’attendre. La petite voiture bleue retourne en enfer. Gobage sous les branches, de nouveau. Ouf! L’eau à repris son niveau initial et sa transparence.

Je change de rive. Mon approche est lente et me permet de me positionner idéalement à une dizaine de mètre du gobage. J’ai confiance. Posé discret de trois quart. Une seconde, deux, GLOUP, pendue! La truite saute et se dépat parfaitement mettant à rude épreuve ma longue pointe en dix centième. Quel bonheur! Elle est en pleine forme. Sa tête semble minuscule devant son corps rebondi. C’est une cousine Comtoise de la truite bretonne de NPA. Elle retournera vite à l’eau.

Quelle journée! Sans changer de place, je reprends deux poissons sur la même mouche. Ces truites si difficiles d’habitude se jettent sans prier sur ma mouche d’Ornans… Je suis seul sur la rivière et je pratique exclusivement le no kill, soit la remise à l’eau des poissons. Oui, oui, c’est comme ça. Essayez vous verrez, cela décuple le plaisir. Finalement, c’est très égoïste. Vous verrez que la vision du poisson qui retourne à son élément procure une sensation délicieuse et heureuse.

Je pourrais conter chaque moments de cette après midi. Gobage, dérive, prise, très peu de refus. Les situations semblent se répéter et pourtant, chaque coup de ligne apporte sa beauté et son émotion.

Un peu plus loin, Saint Pierre me fait un cadeau. En l’espèce, c’est une truite, mais pas n’importe laquelle. Une vraie mémère du genre de celles qui font la renommée des grands nympheurs de la région. Elle est sortie dans un courant, rien ne lui échappe. Un cadeau! Je change ma pointe par du douze et fixe une nymphe. Je ne prends pas le temps de me concentrer et présente l’imitation dans le courant. Je ne vois pas la truite mais elle est bien là. Ma nymphe n’a pas fait cinquante centimètres que la belle surgie, reste en surface et la happe. Dieu, qu’elle est grande et grasse!

Aller, je remue le fer dans la plaie, Je me dévoile au grand jour. La personne qui écris ces lignes est un parfait et recherché CRETIN, un abruti de la pire espèce, un incapable, un bon à rien tout juste bon pour la pèche à l’asticot dans une réserve ou une pécherie. Vraiment, le dernier des derniers… Pauvre de lui, misère et commisération!

Pourquoi tant d’invectives? Jugez plutôt ce jeune apprenti présomptueux qui passe un quart de son temps au cul des truites dans l’espoir d’en tenir une vrais belle mais qui ne maitrise pas même le ferrage. Ce jeune clown qui confond ferrer un poisson avec une démonstration de tir à la corde.

La truite est restée quelques secondes en surface. Elle a secoué son énorme tête surprise et s’est enfoncée dans son pool. ABRUTI!!!

Comme grace à mon prénom Saint Pierre est plutôt sympa avec moi, ou par pitié pour cette pauvre créature, il me fit la grace de parfaire mon entrainement sur des poissons rendus faciles par la sortie d’éphémerella ignita.

Une bien belle journée qui s’éloigne et se referme dans les brumes. J’aime la pluie d’été.

12 commentaires.

  1. Salut Pierrick,
    Trop modeste, en effet le numérique facilite certaines choses, et je sui bien d’accord avec toi c’est dans l’emploi des diverses options ( recadrage, couleurs…)que se révelle à nouveau l’artiste ! Enfin c’est l’ avis pero d’un petit aquarelliste amateur qui voit dans cette technologie beaucoup de possibilités…quoi qu’il soit bravo…images et textes magnifiques
    A+

  2. Merci Zabflo.
    Non ce n’est pas mon métier… J’aimais bien la photo avec les argentiques mais faute de temps, je n’en fais plus. Donc aujourd’hui, le mérite revient à la technologie. Le numérique c’est pratique mais je ne sais pas s’il s’agit vraiment de photos. Reste le regard que l’on a sur les choses… merci.

  3. Ah ces rivières qui me manquent tant !
    J’adore tes photos : est-ce ton métier ou simplement une passion ?

  4. Merci Pierrick de me faire découvrir ta belle région et ses rivières.
    Toujours aussi bon de te lire, j’ai l’impression d’être à tes côtés quand tu pêches.
    Tu auras, j’en suis sûr, l’occasion de la revoir ta mémère et tu feras un récit du tonnerre. 😉

  5. Je rentre de vacances, ça fait plaisir de te lire, récit sympa, j’ai les images en tête, souvenirs souvenirs !! belles photos, pour la casse, il faut se dire qu’on a encore à apprendre et à dompter ses émotions pour rejoindre la perfection…c’est à dire jamais et tant mieux !! J’ai cassé à deux reprises ces derniers jours sur des chevesnes au coup du soir avec des sedges sur 14…
    A très bientôt !!

  6. Le mois d’aout m’a toujours déçu coté pêche. Hormis les jours de pluie…
    La prochaine grosse que tu croiseras, tu doseras mieux ton ferrage. C’est comme ça qu’on apprend.
    Belle partie de pêche en tout cas.
    Fred

  7. Toujours autant de plaisir à te lire…
    Moi aussi j’aime beacoup ces pluies d’été…

  8. Photos magnifiques!!!Bravo!j’aime bien les retouches.
    Ces zébrés me rappele toujours de trés bon souvenirs.
    Ciao.

  9. bonjour Pierick
    je vois avec plaisir que toi aussi tu as su saisir le bon moment.
    et je te rassure moi aussi ,je suis un beau crétin car j’ai moi aussi loupé un très beau poisson.
    mais bref quel plaisir tu nous donnes la encore.
    des textes , des images ,et du bonheur
    grand merci à toi.

  10. Encore une belle tranche de vie sur cette magnifique rivière.
    Toujours aussi plasiant à lire.
    J’aime bien le cadrage de certainnes photos.

Commentaires clos.