3 – QUELQUES PERIGRINATIONS

Il faut parfois vraiment se décarcasser pour assurer sa
pêche. Le choix du parcours fait parti des données nécessaires à la réussite de
la journée. Ainsi selon ce que je recherche, tel parcours collera mieux à mon
sentiment du moment par exemple pour son aspect retiré, son caractère peu
accessible. Plus tard dans la saison, je rechercherai les coins à gros poissons
et, là encore, je préfère, pour d’autre raisons, ne pas être dérangé.

Ainsi, c’est vrais a-t-on parfois un peu tendance à s’approprier
psychologiquement certains sanctuaires… C’est ainsi que je retrouvais hier « ma
rivière idéale ».

Je ne me lasse pas de contempler ce carré de paradis,
entouré d’un formidable chaos naturel. Après avoir pêché plus bas deux bonnes heures
sans avoir fait lever un poisson en nymphe au fil les choses sérieuses allaient
commencer…

Dans ce jardin d’Eden j’avance de la pointe des pieds. Je
souhaite absolument ne pas déranger par ma présence l’équilibre et la paix du
lieu car chaque centimètre de végétation ou de roche est une perfection.

La pêche
est ainsi mesurée, les faux lancers comptés et les dérives appréciées au plus
juste.

Malgré ces précautions, je ratais une première jolie zébrée. Qu’à cela
ne tienne, un beau poisson se tenait au fil de l’eau dans la vasque suivante. Je
le surplombais cependant et ne pouvait l’attaquer que d’un gros bloc de roche
recouvert d’un épais matelas de mousse. Après avoir observé une dizaine de
minutes cette truite pendant lesquelles elle me donna le plaisir de la voir gober
à deux reprises un insecte, je me décidais de l’attaquer en nymphe à
vue.

Au premier passage la truite fit une embardée de vingt
centimètres, stoppa net et happa la nymphe. Ferrage retardé et immédiatement le
grand jeu. Le poisson disparaît de ma vue direction un trou dans lequel
se dressait les restes d’un sapin. Je bride net. La truite tourne et se
tortille avec fureur le nez à quelques centimètres de l’obstacle. Heureusement
que ma pointe était en douze centième et suffisamment longue pour amortir… La manÅ“uvre
ayant échoué elle préféra soudain dévaler. C’est alors que je me redressais
pour la suivre que je m’aperçu trembler comme une feuille de la tête au
pied…

Deux vasques plus en aval, j’échouais enfin dans mon
épuisette une magnifique zébrée sans un seul point rouge d’environ 40 cm. Mon
premier poisson convenable de la saison. Toujours tremblant, ayant peine à respirer, je la décrochais et
plongeait le numérique pour un beau cliché subaquatique. La truite fila et… j’avais
oublié de brancher l’appareil.

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Nous avons oublié nos origines. Nous venons de l’eau. Nous
avons été bercé par l’eau. C’est notre premier milieu. Ne pas la respecter, c’est
se nier et perdre la mémoire de ses origines. Je rêve parfois que celle-ci se
rebelle et se rappelle à ceux qui l’ont niées. Je prie parfois pour la
destruction des barrages et des nuisibles qui se servent de leur technologie
pour asseoir temporairement leur soif de pouvoir et de domination. Entendez-vous les clameurs qui montent des vallées ? Allier, Dordogne, Doubs, Rivière d’Ain… L’entendez
vous ? C’est hélas vos enfants, vos petits enfants, nos enfants, nos petits
enfants qui la subiront. Ca va faire mal… craignez!!

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La nature est un chaos ressourçant. J’ai baigné dedans tout
le reste de la journée à traquer des chimères dans ces eaux violentes. Quelques
petites truites… J’ai regretté ne pas avoir sur moi mes mouches noyées. Il m’était
arrivé, par ce débit, de faire bouger quelques poissons intéressants. Ce sera
la prochaine fois.

7 commentaires.

  1. Encore un très joli récit, bravo pour la façon dont tu fais partager ta passion, notre passion, j’ai eu moins de chance hier, je suis resté en Côte d’Or et sur la Seine, eaux assez basses et aucune activité, rien du tout donc tu avais fait le bon choix de la bonne et belle sortie !! Va falloir que je sorte du 21 !!!

  2. Oui, c’est bien Nicolas Germain et maintenant je me souvient de notre rencontre à Goumois……..
    Au plaisir de se rencontrer de nouveau
    A+ Nicolas

  3. bravo Pierrick tu nous enchantes encore une fois et en plus tu y met un joli texte merci à toi ,tu nous fait voir que nous ne sommes pas tous fou .comme tu le dis nous sommes tous des enfants de la terre ,respectons la .
    à bientot ami rêveur.

  4. « J’étais sur la même rivière et le même jour mais un peu plus haut, on aurai pu se rencontrer… »
    … ou à Crotenay. Je commence à être un fidèle de votre société de pêche et du merveilleux parcours qui va avec. On s’était par ailleurs rencontré à la fermeture 2005 à Goumois. En fait Nicolas, c’est bien Nicolas Germain???

  5. Chouette coin : j’ai hâte d’y retourner.
    Quoiqu’il en soit, tes photos sont très belles !

  6. J’étais sur la même rivière et le même jour mais un peu plus haut, on aurai pu se rencontrer….

  7. Magnifique hommage à cette source de vie.
    Trés jolies photos; quel cadre enchanteur.
    Tu as raison, beaucoup oublient que sans elle nous ne serions pas là.
    Elle mérite bien mieux que ce que nous lui faisons subir.

Commentaires clos.